mercredi 27 février 2013

Le V day ?

Pour ceux de mes lecteurs qui connaissent mal l'Italie, rappelons que Beppe Grillo est l’initiateur des "V day", pour Va fan culo, littéralement allez vous faire foutre. Ces V day ont réuni pendant des années des millions de participants au total dans toute l'Italie, et encore tout récemment 500 000 personnes à Rome alors que Bersani réunissait 400 personnes dans un théatre. Certes, pour augmenter ses chances de succès, le mouvement s'est renommé "Mouvement 5 étoiles", mais avec un V d'une couleur différente comme pour en rappeler l'origine.

Aujourd'hui, le moVimento est le premier parti politique d'Italie (le PD et le PDL étant derrières). Bersani, dont la coalition est arrivée en tête de 125000 votants (0,3%) à la chambre des députés lui demande ce qu'il veut. Faire exploser le système ? Certains (Robeco ce matin sur BFM Business) pensent que le fait d'envoyer 160 députés et sénateurs vont le faire rentrer dans le système. Je ne le crois pas, c'est méconnaître le particularisme de la politique en Italie et la puissance des idées utopiques et romantiques - à l'extrême gauche comme à l'extrême droite - qui en font parfois un pays hors contrôle.

La vraie question est la suivante : ce succès incroyable d'un mouvement contestataire est-il un avatar strictement limité à l'Italie ou un fait prédictif d'une implosion de l'Europe. Personnellement, je penche plutôt pour la deuxième hypothèse : l'explosion du chômage dans les pays du Sud et en France amènera tôt ou tard au pouvoir un parti politique qui mettra en œuvre sa plate-forme électorale de sortie de l'Euro. Qui pourra alors s'opposer à un choix démocratique ? En attendant, regardons et apprécions cette expérience italienne qui n'a vraiment rien d'une Comedia dell arte.

lundi 18 février 2013

Revenir sur terre ...

L'abandon de l'objectif de déficit de 3% pour 2013 et les commentaires du gouvernement sur la nécessaire distinction entre déficit structurel et déficit conjoncturel pour relativiser le problème oblige à un certain nombre de remises en perspective.

D'abord, que signifie l'atteinte de l'objectif : un soulagement pour nos créanciers, certainement. Une solution aux problèmes de l'économie française ? certainement pas, il suffit d'ailleurs de regarder les chiffres dans un passé récent pour s'apercevoir qu'avant la crise de 2008, la France a eu pendant 4 ans un déficit moyen proche des 3% sans qu'on se souvienne de cette période positivement pour l'économie française. Autrement dit, même si on arrivait à cet objectif, on ressemblerait un peu au malade qui meurt guéri.

Avait-on une chance d'y arriver ? 2012 fut soi-disant une année de rigueur. Il est vraisemblable que le déficit dépassera les 4,5% annoncés (4,7 ?) soit une timide baisse de 0,5% sur l'année par rapport à 2011. Certes, les hausses d'impôts devraient avoir un effet plein sur 2013 mais il est possible que les rendements soient décevants vu le maintien d'un certain nombre de niches fiscales et de secteurs non taxés sur lesquels l'argent va certainement se ré-allouer. L'effort de rigueur des ministères sera difficile sans réduction du nombre et des salaires des fonctionnaires, il est d'ailleurs symptomatique que le débat sur le complément de rigueur se soit tout de suite arrêté au problème des allocations familiales, comme s'il n'y avait pas d'autres sujets. Un certain nombre de dépenses ont été engagées par ailleurs qui vont finir par peser. Enfin, le gouvernement prévoit une reprise de la croissance sur la fin 2013 mais quid de l'effet récessif des hausses d'impôts ? Au final, il ne me surprendrait pas que le déficit 2013 soit plus proche des 4% que des 3%, marquant à nouveau une amélioration timide (surtout par rapport aux effets d'annonce et aux hausses d'impôts).

Le vrai problème n'est pas là mais plutôt quel sera l'état de l'économie française fin 2013 ? C'est la question qui compte et qui déterminera l'attitude des marchés financiers sur l'évaluation de la dette française. Il est certain qu'une faiblesse relative durable serait de mauvais augure. A ce sujet, il faut s'arrêter un moment sur la dernière trouvaille de notre gouvernement, filou une fois de plus : la différence entre déficit structurel et conjoncturel. Le déficit structurel étant celui que nous aurions si la conjoncture était bonne (avec des si ....). François Hollande a provoqué une hilarité gênée en Inde quand il a "benoîtement" expliqué aux hommes d'affaires indiens qu'en France on lutte pour avoir une croissance qui ne soit pas en dessous de zéro ! Cela, c'est le structurel. Le conjoncturel, c'est si l'Inde descend en dessous de 5% et la Chine de 8%. Je crains que la subtilité de l'argument ne se retourne contre nous. En tout cas, cela me fait penser à la mauvaise foi que les cancres peuvent parfois déployer pour masquer leur manque de travail ....

"Wait and See" j'ai dit ?

vendredi 15 février 2013

Matrubhoomi, un monde sans femmes

Non, je ne commenterai pas le mauvais chiffre de la croissance en France : zéro en 2013 après -0,3% sur le 4ème trimestre. Disons simplement que ce n'est évidemment pas glorieux, c'est légèrement moins bien qu'attendu mais pas forcément pire que dans les autres pays d’Europe. En tout cas, cela n'affole pas encore les marchés financiers, de même que le report de l'objectif de réduction des déficits à 3% en 2013.

Wait and See !

En échos à mon dernier billet sur l'Inde, aujourd'hui d'actualité avec le voyage de François Hollande et la possible vente des Rafales à l'armée de l'air indienne, je termine un cycle sur le cinéma indien (qui ne se limite pas au seul "Bollywood") avec le film sorti en 2003 du réalisateur indien Manish Ja, intitulé : "Matrubhoomi, un monde sans femmes" (Matrubhoomi voulant dire la mère patrie). Ce film qui commence avec le rappel qu'il manque à l'Inde actuellement 35 millions de femmes, avortées ou tuées juste après la naissance, raconte le martyre d'une femme mariée contre de l'argent non pas à un seul homme mais à une famille de 5 garçons. Le film qui débute avec la noyade d'une petite fille dans une bassine de lait par son père (je pensais que c'était un baptême ...) tout en disant :"l'année prochaine, un garçon" se termine en bain de sang généralisé suite au meutre d'un intouchable du village par la belle-famille de la mariée, d'une classe supérieure, qui paradoxalement met fin à son supplice en tuant tous ses tourmenteurs.

Le film présente les hommes d'une façon tellement odieuses qu'on se dit que ce n'est pas possible, mais pourquoi un réalisateur indien caricaturerait-il la réalité ? Malheureusement, les statistiques et les informations apportées sur cette dramatique affaire de viol confirment cet état de violence permanente faite au femmes. La dernière polémique portant sur des examens barbares imposés aux victimes consistant à vérifier par le test dit des 2 doigts l'existence ou non de relations sexuelles régulières en dehors du viol ....

Sur l'autre sujet d'actualité : la vente des Rafales, là aussi le cinéma nous éclaire. Le film Line of Control relate la dernière guerre indo-pakistainaise dite des glaciers de Kargill. Environ mille morts de chaque coté, et aucun prisonnier. Quand on voit le film, on comprend pourquoi. La vente possible de nos Rafale en Inde fait naturellement l'objet de beaucoup de commentaires dans la presse indienne et sur les réseaux sociaux. Il en ressort, si l'on met de coté les doutes toujours possibles quant au choix : est-ce vraiment le meilleur avion ou le meilleur choix pour l'armée Indienne ?, avant tout l'extraordinaire sentiment d'insécurité des indiens coincés entre 2 voisins pakistanais et chinois vus comme belliqueux et dangereux. La question du prix de l'avion est souvent bottée en touche dans les réseaux sociaux, considérant qu'il en va de la survie de l'Inde d'avoir une armée de l'air capable de combattre sur 2 fronts. A ce sujet, les indiens n'oublient pas que lors de la guerre du Pakistan oriental qui vit la victoire de l'Inde, le Pakistan avait tenté une attaque aérienne massive et soudaine copiée sur les méthodes de l'armée de l'air israélienne qui échoua finalement mais qui laissa une peur rétrospective très forte en Inde. Nul doute que dans l'esprit des indiens, ces avions seront appelés à servir un jour.